FESPACO 2015 Le FESPACO des premières !

 Après l’annulation du Tour cycliste du Faso et du Salon international de l’artisanat de Ouagadougou (SIAO) en octobre 2014, les dirigeants de la transition avec l’aval des responsables du département ministériel ayant en la santé  ont décidé de maintenir la 24e édition du Festival panafricain du Cinéma et de la Télévision de Ouagadougou (FESPACO). Ni la révolution populaire d’octobre dernier, ni Ebola, ni les sautes d’humeur du régiment de sécurité présidentiel (RSP) n’ont pu empêcher ce rendez-vous prestigieux du 7e art africain à Ouagadougou.

IMG_6265Malgré tout, le FESPACO 2015 placé sous le thème : « cinéma africain : production et diffusion à l’ère du numérique », se tient du 28 février au 7 mars 2015 avec une ouverture à la diaspora africaine dans la compétition officielle. Une première dans l’histoire de la biennale !

Les responsables du FESPACO ont décidé de convier l’Egypte comme hôte d’honneur à la 24e édition du Festival qui a enregistré à la date limite fixée au 21 nombre 2014, six cent quatre-vingt (680) œuvres cinématographiques. Le comité de sélection a retenu cent trente trois (133) films dont quatre vingt-cinq (85) pour la compétition officielle. Parmi ces œuvres, l’on dénombre dix neuf (19) longs métrages venant de créateurs de seize pays, vingt deux (22) courts métrages, vingt (20) documentaires, neuf ( 9) séries télévision et de quinze (15) films des écoles africaines de cinéma. A ces productions s’ajoutent, en panorama (hors compétition), 48 films de cinémas d’Afrique et du monde.

S’il est difficile de dégager des favoris dans la course à l’étalon d’or de Yennenga, néanmoins l’on ne peut s’empêcher d’affirmer que la compétition dans la catégorie des films longs métrages s’annonce serrée au regard de la présence de certains grands noms du cinéma africain. Les réalisateurs Abderrahmane Sissako de la Mauritanie  et Cheik Oumar Cissoko du Mali, deux anciens « yennenguistes » sont en compétition respectivement avec « Timbuktu » pour le premier  cité et « Rapt à Bamako » pour le deuxième nommé. Abderrahmane Sissako a remporté l’étalon de Yennenga en 2003 avec sa fiction « En attendant le bonheur » tandis que Cheik Oumar Sissoko montait sur la plus haute marche du festival en 1995 avec « Guimba ».

D’ailleurs, le jury de la catégorie phare des longs métrages sera présidé par le réalisateur ghanéen Kwaw Ansah qui avait obtenu l’étalon de Yennenga  avec son film « Heritage Africa » en 1989

            Toujours dans cette même section, des cinéastes malgré leur absence sont  néanmoins présents à Ouagadougou à travers des collaborations artistiques savamment menées. Le Marocain Hicham Ayouch, le réalisateur de « Fièvres»  est le jeune frère de Nabil Ayouch qui a remporté l’étalon de Yennenga en 2001 avec son film « Ali Zoua ». Quatorze ans après, Hicham peut prétendre au sacre suprême au nom des frères Ayouch.  Notons également que Nabil Ayouch est aussi le producteur du long métrage  « C’est eux les chiens » réalisé par son compatriote Hicham Lasri.

Si des films de la catégorie des longs métrages ont déjà été vus à des festivals comme c’est le cas pour « Timbuktu »,  « C’est eux les chiens » ; d’autres par contre feront leur grande première à ce festivval. Des fictions comme « Morbayassa » du Guinéen Cheik F. Camara, « L’œil du cyclone » du Burkinabè Sékou Traoré, « Cellule 512 » de Missa Hébié, également du Burkina Faso feront leur grande première à cette biennale du cinéma africain.

 Le FESPACO 2015 est aussi l’édition des « premières ». La présente édition est la première du Burkina Faso post-insurrectionnel. Une nouvelle équipe dirigeante pour le pays, un nouveau délégué général et de nouvelles décisions. Le vainqueur dans la catégorie des films longs métrages partira avec le trophée et la somme de 20 millions de francs CFA. Une première depuis l’édition précédente. Pour la première fois, trois réalisatrices de trois pays différents sont en compétition dans la catégorie films longs métrages. Dyana Gaye du Sénégal est candidate à l’étalon d’or de yennenga avec son film « Des étoiles ». L’Ethiopienne Hailary Hermon est elle aussi  en cours pour le sacre suprême avec sa fiction « Price of love ». Enfin, la réalisatrice tunisienne Raja Amari ne pense pas faire de la figuration au FESPACO 2015 avec son film « printemps tunisien ».

Pour la première fois, des films de la diaspora africaine ont été intégrés dans la compétition officielle. La fiction « Haïti Bride » du réalisateur Ramesar Yao  du Trinidad et Tobago dans la catégorie des films longs métrages est la preuve de cette ouverture qui est une première dans le festival depuis 1969.  Et pour la première fois, le numérique est admis  dans la compétition officielle. Ainsi, les réalisateurs africains et de la diaspora ne seront plus obligés de réaliser ou convertir leurs films en 35 millimètres, un format coûteux et anachronique dans une société devenue esclave des outils des technologies de l’information et de la communication. Il s’agit incontestablement de la marche évolutive de l’histoire de la biennale enrichissant ainsi la création et la recherche esthétiques de nouvelles approches du cinéma africain. Les défis de ce nouveau départ en adéquation avec la technologie seront longuement discutés lors d’un colloque consacré au « Cinéma africain : production et diffusion à l’ère du numérique ».

La problématique du « numérique » dans la création cinématographique est un débat récurrent qui a fait école dans le milieu du 7eart pour certains depuis 1945 avec la fin de la deuxième guerre mondiale ; pour d’autres dans les années 1960 avec l’expérimentation de  l’art vidéo et pour d’autres enfin, dès le XIXe et ce, avec l’apparition de la photographie.

A la 15e édition du FESPACO, la réflexion s’était greffée autour de la problématique du numérique et ses enjeux pour le cinéma et l’audiovisuel africains. Les éditions de 1999, 2001 et de  2011 ont  traité d’une thématique similaire.

Le passage au numérique en Afrique subsaharienne autour des années 2000 a sans doute bouleversé la pratique cinématographique et audiovisuelle sur le continent. Au niveau de la production et de la réalisation, les outils vidéo tout en apportant plus de solution aux créateurs, ont aussi apporté un boom à la production d’œuvres cinématographiques et audiovisuelles africaines. Cela se vérifie par le nombre croissant de films inscrits aux différentes éditions du FESPACO. Sept cent cinquante-cinq (755) films en 2013 contre quatre cent soixante-quatre (464) en 2011.

Abraham BAYILI

 

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