Adama Pacodé, La récupération comme un art


Damso, comme l’appellent ses fans, a fait de la récupération un véritable art. Couturier de formation, il s’est lancé dans le monde des arts plastiques  depuis 1991. Aujourd’hui, l’artiste compte beaucoup parmi les jeunes talents de la place. Le mercredi 2 février dernier, Damso a accepté de nous ouvrir les portes de son atelier, au secteur 10 de Ouagadougou.

PacodéIl est 14 heures quand nous arrivons à Hamdalaye, un quartier du secteur 10 de Ouagadougou. Sur une rue poussiéreuse, un jeune homme attend devant un portail vert. C’est Damso, l’artiste. « Bonne arrivée » nous lance-t-il avec un bref sourire. Après une courte présentation de notre équipe, il nous ouvre les portes de la concession qui abrite son atelier. C’est une cour modeste de trois habitations. Devant l’une d’elles, sous un hangar de fortune, un vieillard, le regard interrogateur, scrute le temps. Ce septuagénaire est le père de l’artiste. Une brève salutation en langue mooré avec le vieux nous ouvre le passage et nous voilà dans l’atelier de Damso, l’artiste récupérateur. Dans cette habitation transformée en atelier de peinture, on découvre le mystère de l’art de Damso. En effet, dans un coin de l’atelier, sous une table, se trouve entassé du matériel de récupération. On peut identifier dans ce bric-à-brac de vieux sacs, des sachets usés de toutes les couleurs, des feuilles mortes, de la cendre, du charbon mouillé, du sable, du coton sale… bref, tout ce que les ménages ont jeté. « C’est ce matériel que je ramasse dans les décharges qui nourrit mon art. » Déclare l’artiste. Sur les murs de l’atelier, des toiles difficiles à lire  sont accrochées.

 L’artiste et la tradition

Pendant une bonne heure, l’artiste explique le sens de ses tableaux. Sur la quasi-totalité de ses toiles, la tradition occupe une place importante. On y voit par exemple des cauris, des os d’animaux sauvages, des cornes ou du tissu traditionnel. «Dans ce que je fais, je m’inspire beaucoup de la tradition et des réalités de mon terroir. »

Sur la principale table de l’atelier, une toile fraîchement achevée attire notre attention. Sur ce tableau, on peut littéralement voir une main portant un couteau prêt à transpercer quelque chose ; en bas, un pied marche sur un œuf cassé. « Damso, lui lance un confrère, dis-moi, c’est quoi ça encore ? Je vois un couteau, un pied, un œuf cassé… ». « C’est l’image actuelle de mon terroir : la folle envie des gens de vouloir tuer ce qui est déjà mort. C’est ce que montre le pied marchant sur l’œuf cassé et le couteau se dirigeant vers un cœur malade » répond l’artiste à notre confrère un peu embarrassé malgré tout par l’explication.

En ressortant de la cour, le vieux Pacodé n’était plus là pour nous livrer son interprétation des œuvres de son fils. Dommage, il avait peut-être à nous dire sur cette « folle envie des gens de vouloir tuer ce qui est déjà mort ».

Abraham BAYILI

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